Auberges communales : les facteurs de réussite

Rédigé le 27/05/2024


Quelles réflexions la Municipalité doit-elle mener lorsqu’il s’agit de penser à l’avenir de son auberge communale ? Que doit-on définir et à quoi faut-il réfléchir avant de chercher un exploitant pour son auberge ? Que doivent contenir cahier des charges et contrats de location ? Plongez-vous dans cet article et découvrez les facteurs de réussite d’une auberge communale.

En préambule, il faut bien avoir en tête que le propriétaire de l’auberge est une collectivité publique. La population sera donc forcément touchée par l’avenir qui est destiné à l’auberge.

Par ailleurs, chaque auberge est particulière, de par son emplacement, sa vocation, la population qui l’entoure, son histoire, son environnement et il n’est, dès lors, pas possible d’établir des règles générales pour toutes les auberges communales. Néanmoins, mener les bonnes réflexions à ce sujet permet d’assurer un bel avenir aux auberges communales dès lors qu’on décide de les maintenir, de les rénover ou d’en construire.

Quel avenir pour mon auberge ?

Avant de décider du devenir d’une auberge communale, il convient d’avoir en tête les différentes possibilités qui s’offrent à nous.

Maintenir une auberge signifie l’entretenir, que ce soit l’isolation, la toiture, les équipements de cuisine, etc., sachant que les normes évoluent sans cesse et qu’elles deviennent souvent de plus en plus restrictives. Les équipements liés à la restauration doivent être renouvelés fréquemment. En ce qui concerne les charges d’exploitation, le restaurateur doit payer tout ce qui résulte de l’usage de la chose. Maintenir une auberge c’est être conscient que c’est un investissement. Les communes qui décident de les maintenir le font souvent plus pour le lien social que l’auberge crée que pour l’argent que cela leur apporte car les loyers sont souvent raisonnables.

Autre choix : construire ou rénover une auberge. Dans ce cas, il faut être conscient de la réglementation en vigueur, qu’elle soit fédérale, cantonale ou communale. Construire ou rénover, c’est devoir respecter de nombreuses lois relatives à la protection du patrimoine (LPNMS), à l’aération mécanique des locaux habitables ou utilisables pour le secteur tertiaire (RLATC), aux denrées alimentaires et à l’hygiène (ODAlOUs et OHyg), aux auberges et débits de boissons (LADB), au travail dans l’industrie, l’artisanat et le commerce (LTr), etc. sans compter les directives et règlements communaux. D’autres prescriptions et normes liées à l’acoustique, à la gestion des déchets, à la gestion des eaux claires de toiture, etc., existent aussi.

Dernière solution : fermer. Parfois un non-octroi de budget pour la rénovation, une impossibilité à modifier l’affectation des locaux ou d’autres raisons font que fermer devient une nécessité, avec les conséquences que cela implique pour la vie du village comme évoqué par M. Meystre à la fin de son article dans ce dossier.

Réflexions à avoir lors de la création ou la rénovation d’une auberge

Première réflexion : l’affectation des locaux

Il faut d’abord penser à la nature des locaux. Un local sanitaire, un local de stockage, les places de parc, la gestion des déchets, etc., prennent de la place et ne doivent pas être oubliés.

La capacité d’accueil doit être bien réfléchie aussi. Selon le type de restauration proposée, on n’accueillera pas le même nombre de personnes.

Il convient aussi d’évaluer si proposer quelques chambres est ou non opportun, selon l’emplacement de l’auberge, l’attrait touristique de la région, etc.

Doit-on proposer un appartement de service pour l’exploitant est aussi une question à se poser. Souvent le lieu de l’auberge et la situation familiale de l’exploitant influencent cette décision. Si on décide de louer l’appartement de service à un tiers, il faut que le locataire puisse vivre convenablement sans être gêné par les nuisances potentielles du restaurant (odeurs, bruit, etc.).

La planification des locaux est aussi essentielle. Il faut analyser les voies de circulation dans l’auberge, les liaisons avec la terrasse (les serveurs peuvent-ils par exemple garder un contact visuel avec les clients de la terrasse ?), l’accès pour les personnes à mobilité réduite, etc. Trouver du personnel de service pour les auberges et restaurants étant de plus en plus difficile, il convient de leur fournir de bonnes conditions de travail en leur facilitant le quotidien.

Deuxième réflexion : le fonds de commerce

Le fonds de commerce comprend à la fois les valeurs matérielles (mobilier, matériel, machines) et les valeurs immatérielles (pas-de-porte, droit au bail, …). Pour les auberges dont les murs appartiennent à une commune, soit à une collectivité publique, les valeurs immatérielles ne doivent pas entrer en ligne de compte. Il est ainsi nécessaire de prévoir dans le bail une clause d’interdiction de pas-de-porte par exemple.

Troisième réflexion : concurrence et positionnement de l’offre

La commune doit réfléchir au genre de restauration qu’elle souhaite. Pour cela, faire un état des lieux de ce qui est déjà proposé dans la commune et dans les communes environnantes est essentiel. On analyse ainsi la concurrence. Quels types d’établissements fonctionnent actuellement ? Quels sont leurs jours et horaires d’ouverture ? Que manque-t-il ? Etc.

Penser à la clientèle qu’on souhaite toucher est aussi primordial. Si c’est sa population, on dresse un profil de celle-ci, de son pouvoir d’achat et de ses habitudes. On peut aussi vouloir toucher la clientèle touristique si on se situe dans une région qui l’est mais
aussi la clientèle de passage, d’affaires, etc. On ne proposera pas, par exemple, des repas gastronomiques à des prix élevés au milieu d’un village d’agriculteurs qui veulent plutôt manger à midi, rapidement et en quantité suffisante.

Les besoins locaux et les synergies (avec les clubs sportifs, les associations, les UAPE, etc.) sont aussi à envisager. On peut également imaginer des services additionnels que l’auberge communale pourrait proposer : bibliothèque, dépôt de pain, petite épicerie, poste, etc.

Il est aussi possible de proposer deux types de salles ou de restauration (brasserie le midi par exemple et bistronomique le soir).

Le plus important et le principal facteur de réussite d’une auberge réside souvent dans la capacité du propriétaire (la commune) et de l’exploitant (le restaurateur) à se renouveler et à s’adapter à l’évolution de la demande.

Cahier des charges et contrat de location

Avant même de rechercher un exploitant, il convient de réfléchir au cahier des charges et au contrat de location. Mieux ils seront ficelés, plus il y aura de chance que l’auberge communale fonctionne bien. La loi prévoit que le contrat de location puisse être transféré ou sous-loué donc il est d’autant plus important de bien réfléchir à ces deux documents.

Il n’existe pas de bail type pour les auberges communales mais certains éléments doivent forcément y figurer, notamment les prestations offertes par la commune (ameublement, agencement, etc.), ce que le restaurateur peut attendre de la commune mais aussi des informations sur le type de fournisseurs à avoir, sur les vacances annuelles, les jours de fermeture, etc.

Le contrat de location doit comprendre les clauses essentielles que sont, par exemple, les jours et horaires d’ouverture et fermeture (on peut par exemple spécifier qu’ils doivent être convenus avec la commune), la durée du contrat (en général 5 ans avec un renouvellement d’année en année ou tous les 5 ans), le loyer (fixe, échelonné ou proportionnel au chiffre d’affaires) ou encore le droit de contrôle sur le mobilier par la commune.

Des dispositions particulières peuvent être intégrées dans le contrat de location : entretien des extérieurs, enseigne lumineuse, nom de l’auberge, concept commercial, etc.

La recherche d’un nouvel exploitant

Une fois toutes ces réflexions menées et ces documents préparés, la recherche d’un locataire peut commencer. Ce domaine étant très lié à l’émotionnel, il convient de privilégier les qualités professionnelles et entrepreneuriales des candidats. Un très bon cuisinier ne fera pas forcément un très bon gérant d’auberge. Il ne faut pas non plus sélectionner les candidats uniquement sur la base de leur capacité financière mais il convient de s’assurer que l’exploitant pourra assurer financièrement (au travers d’une banque ou d’un cautionnement) et que la commune ne devra pas jouer la banque pour lui.

L’usage veut que la commune pratique en général une politique de loyer raisonnable pour l’auberge communale et qu’elle mette à disposition des locaux fonctionnels, répondant aux exigences de la branche.

Finalement, même si la recherche d’un exploitant est souvent du ressort d’un conseiller municipal, parfois accompagné d’une personne externe, impliquer l’entier de la Municipalité pour le choix final de l’exploitant est indispensable. 

Article rédigé par Remi Susset et Peter Neuhaus, Responsables de mandat Conseil en entreprise chez Gastroconsult.