SOPV ! Objectifs des polices communales vaudoises et formation continue

Rédigé le 27/05/2024


Le renouvellement des effectifs de police a fait l’objet d’une chronique parue dans l’édition de printemps de Point CommUNE ! Après le recrutement ouvrant les portes de la formation de base, voici un bref tour d’horizon de la police d’aujourd’hui et de sa formation continue.

Pour en parler, le micro a été tendu au lieutenant-colonel Dan-Henri Weber (commandant de la Police Est Lausannois – PEL), président de la Société des officiers des polices communales vaudoises (SOPV), et à son vice-président, le lieutenant-colonel Clément Leu (commandant de la Police Région Morges – PRM). Les questions-réponses évoquent l’évolution de la police en général et celle de la formation continue de ses membres. La parole donc aux opérationnels mais avant une biographie expresse de chacun d’entre eux :

Dan-Henri Weber, président de la SOPV et commandant de la PEL

54 ans, dont trente-cinq consacrés à la police : la police municipale de Lausanne d’abord puis la police cantonale durant dix ans avant un retour dans les polices communales : officier sur la Riviera depuis 2003, il deviendra le commandant de la PEL en 2009. Caissier de la SOPV puis vice-président, il en reprend la présidence en 2022.

Clément Leu, vice-président de la SOPV et commandant de la PRM

48 ans, militaire professionnel de formation, c’est en 2016 qu’il trace une nouvelle voie en entrant à la PRM comme officier, avant d’en devenir le commandant en 2019. Très actif dans les milieux de la formation policière, également au niveau suisse, il est élu vice-président de la SOPV en 2023.



Le président de la SOPV, Dan-Henri Weber (à gauche de la photo), et le vice-président, Clément Leu.


La SOPV, par son président

Quelles sont les missions premières d’une conférence de commandants de police (CCPV) et de son président ?

Je compare volontiers mon rôle à celui d’un chef d’orchestre, élu pour coordonner et faciliter les relations entre les neuf corps des polices communales vaudoises. La conférence des commandants est partie prenante, pour y collaborer activement, à l’organisation policière vaudoise selon la loi (LOPV) entrée en vigueur en 2012. Sous l’égide de la direction opérationnelle (DO) du canton, elle est un partenaire direct de la police cantonale vaudoise (PCV). Si les réalités de chaque région sont différentes, en termes d’équipements, de doctrine d’engagement et de formation continue notamment, c’est d’une même voix que les PolCom s’expriment ou font en sorte d’y arriver.

Par le passé, et jusqu’au début des années 2000, on comptait encore quelque quarante corps de police communaux ; depuis la LOPV de 2012, ils ont été regroupés en neuf polices communales (seule la ville de Lausanne dispose toujours de la sienne, la PML) : était-ce mieux avant ?

La société et notre population évoluent sans cesse en nombre et en besoins. Regrouper cette année-là les forces en présence pour continuer d’assurer une sécurité de proximité propre aux villes et agglomérations tenait du bon sens. Neuf pôles sécuritaires dans le canton, en complémentarité avec la gendarmerie qui assure la sécurité des communes ne disposant pas d’une police propre ou régionale, étaient une bonne solution à tous égards, en termes de ressources financières et humaines, et au niveau opérationnel bien sûr. Avec la LOPV, les polices communales vaudoises disposent des mêmes prérogatives (exception faite de la police judiciaire, assurée par la PML et la PCV) et affichent une unité de doctrine similaire à celle de la police cantonale. Evoluer avec son temps, avec et pour la population dont elle fait partie, est le maître mot de l’action policière d’aujourd’hui et de demain.

Quel est le rôle du président de la SOPV face au pouvoir politique communal : quels défis et quels apports aux élu·es ?

Les commandants représentent une force de proposition, tant au niveau opérationnel au sein des corps, que politique par les propositions concrètes qu’ils soumettent à leurs autorités locales. Les décisions sont en effet du ressort des Municipalités et comités de direction des communes et associations de communes membres de la Conférence des directeurs de police (CDPV). Là se situe plus précisément le rôle du président, être le porte-parole des opérationnels devant le pouvoir politique, devant la CDPV. Expliquer et convaincre à l’échelon politique et opérationnel, sur les plans communaux/régionaux et cantonaux, relève, sinon de la quadrature du cercle, du moins d’un défi constamment renouvelé pour assurer un niveau sécuritaire identique à toute la population.

Au niveau cantonal, quel rôle les polices communales jouent-elles aujourd’hui dans l’évolution du paysage policier vaudois (EVOPOL) ?

Le principe de base retenu depuis le Covid-19, dont la collaboration renforcée qui s’est ensuivie avec la police cantonale, est justement… la collaboration ! En d’autres mots, dans la lancée « initiée » par la pandémie, il s’agit de poursuivre toutes les synergies possibles en termes d’équipements, d’outils informatiques, de processus et de procédures. Sous l’égide du Conseil cantonal de sécurité (CCS) présidé par le Conseiller d’Etat Vassilis Venizelos, nous avons convenu d’harmoniser les salaires des aspirants de 1re année des gendarmes et des policiers dès l’école 2024, qui débutera en septembre prochain. Dix employeurs différents paieront désormais le même salaire à l’ensemble des aspirants vaudois, tous parements (rouges et bleus) confondus. Certes, au quotidien, s’agissant par exemple du recrutement (mais on y travaille !) ou de la conduite opérationnelle, des divergences peuvent surgir de part et d’autre. C’est l’art du compromis qui s’impose dès lors, la recherche de consensus entre les PolCom et la PCV, ceci dans l’intérêt de tous. Le second principe de base que retiennent, et appliquent, les policiers communaux est leur rôle de complémentarité avec leurs collègues gendarmes. C’est ainsi qu’ils entendent construire la police de demain, tous ayant à cœur le service à la population.

La formation continue des policiers, par le vice-président de la SOPV

Quels sont les enjeux d’une formation continue à la police, entre contraintes et exigences ?

Les enjeux sont multiples. Outre garantir ses qualifications dans les domaines du tir, de la sécurité personnelle ou encore sur le plan sanitaire, la formation continue de base du policier a aussi pour objectif de suivre les évolutions du code pénal ou encore de la Loi sur la circulation routière. Cette approche générale induit un cycle permanent d’apprentissage, notamment sur toute nouveauté ou évolution du métier, favorisant une bonne capacité d’adaptation et les compétences nécessaires au personnel appelé à relever les défis du quotidien. Vue du côté cour, cette recherche continuelle d’efficience n’est pas sans effet sur l’organisation des corps : libérer des collaborateurs·trices pour suivre des modules de formation, dont celles et ceux qui composent les équipes en tournus 24h/24, nécessite un processus de planification précis permettant la libération des ressources utiles à la formation continue. Et souvent en multipliant les modules pour permettre au plus grand nombre d’y participer.

La formation continue en deux mots : a-t-elle toujours existé ou date-t-elle de la nouvelle Organisation policière vaudoise de 2012 ? Comment a-t-elle évolué depuis cette année clé ?

Si la formation continue existe bel et bien depuis de nombreuses années, elle ne concernait à l’origine que la pratique du tir et la sécurité personnelle. Aujourd’hui, l’offre s’est développée de façon presque pléthorique, englobant les évolutions techniques, procédurales et sociétales qui caractérisent la société actuelle. La formation continue, désormais diversifiée, est ainsi dispensée selon les cas par des organisations de formation externes aux institutions policières, afin d’assurer l’accès à des expertises particulières. Un domaine très important de la formation continue tient aussi dans le développement des compétences liées à l’évolution de la société. C’est la raison pour laquelle sont dorénavant organisés des modules thématiques sur le partenariat, les mineurs, les minorités ethniques, les dépendances, le harcèlement de rue et la communauté LGBTIQ+, ainsi que sur la radicalisation. Ces modules, d’un jour chacun, proposés sous le titre générique « police et société », permettent de former et de sensibiliser le personnel policier sur les tendances et sur leurs dernières évolutions.

Quelle est l’unité de doctrine PolCom face aux exigences formatives d’une profession en constante évolution ?

L’un des objectifs, celui de renforcer la collaboration entre polices communales, est justement d’unifier les doctrines, afin d’être « moteur » des évolutions dans le domaine de la formation au niveau vaudois. La mise en place d’une plateforme de coordination, des synergies utiles entre corps de police, comme le développement de leçons e-learning et la prise en compte de sujets sociétaux, voire encore la formation en préparation mentale, sont quelques exemples significatifs des contributions et développements des PolCom dans le domaine de la formation continue. Les directives et règlements de l’Institut suisse de police (ISP), au même titre que les bases légales du code pénal, du code de procédure pénale ou encore les jurisprudences y relatives forment le socle de cette unité de doctrine, en termes de formation. Les évolutions sociétales constatées par les polices, les autorités politiques et la société civile sont naturellement prises en considération afin de les intégrer dans nos formations continues. Ces « retours du terrain » par nos policiers·ières, ou requis par volonté politique, notamment par des représentants·es de la société civile, s’avèrent cruciaux dans un contexte formatif en constante évolution.

Quelles sont les synergies réelles sur le terrain de la formation entre les polices communales et la police cantonale ? On apprend désormais mieux ensemble ?

Chaque organisation a ses contraintes et ses enjeux mais je suis persuadé que c’est ensemble, en développant des formations continues communes, qu’on est plus fort et qu’on arrive à un plus haut niveau de qualité et d’efficience. Dans ce contexte, une nouveauté a été introduite en 2024 par l’accueil de représentants de la gendarmerie et de la sûreté vaudoise au sein de la commission de formation continue des polices. Les formations « police et société » évoquées plus haut ont ainsi été ouvertes à l’ensemble du personnel policier du canton de Vaud. Dans une structure qui compte désormais tous les corps de police communaux et cantonaux, le défi se situe dans la coordination des ressources, l’ajustement des différents intérêts et des contraintes inhérentes à chaque entité. Ce travail se déroule en bonne intelligence, dans un processus d’amélioration continue. Néanmoins, cette coordination ne doit pas exclure des formations propres à chaque corps, susceptibles de répondre à des besoins spécifiques. Dans notre cadre de travail, où les ressources humaines et financières sont un enjeu stratégique, il est nécessaire de tirer à la même corde au profit de notre population et de nos différentes organisations. Ce qui se fait aujourd’hui se poursuivra demain, avec pour objectif de tendre à l’excellence. 

Article rédigé par Pascal Petter, Secrétaire général des Polices communales vaudoises.